Vie au poste ( Michel Salin)

La toilette
Rudimentaire: pas d’eau chaude... Douche chaude l’été (le réservoir étant en plein soleil). Je revois encore un FSNA partant s’isoler pour sa toilette: une boîte à petits pois, pleine d’eau dans une main, la brosse à dents et le dentifrice dans l’autre: à l’économie! Pour se raser: le rasoir électrique en utilisant des piles du poste radio de l’armée.
La lessive. Le linge de corps est lavé sur place: un poêle dans la cour pour chauffer l’eau.
Il fallait aussi laver (de temps en temps) treillis, draps...
Et les tinettes !  Les W.C. à l’extérieur du poste, dans une cabine en bois; un bidon de 200 litres pour la réception... à vider plusieurs fois par semaine dans un trou loin du poste.
Pas de danger de prendre un livre pour lire : les mouches, l’odeur (malgré la forte dose de grésil) abrégeaient notre visite en ce lieu ! Je revois encore Pierre Veyssière qui, pour manifester son mécontentement, s’arrêtait quelques instants devant la porte du Chef de poste avec sa brouette et son bidon puant : lui faire humer le parfum !
Mais ces tinettes faisaient des envieux: lors d’opérations importantes, quand des unités campaient à proximité de notre poste, les ‘gradés’ étaient bien contents de les utiliser. Je me souviens de l’intervention de Gilbert Latissière : pris d’une envie pressante, il a engueulé vertement l’utilisateur du WC qui tardait à sortir ; quelle n’a pas été sa surprise de voir sortir un Colonel de la guitoune! Un échange de sourires a apaisé tout le monde !
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La chambrée
Lorsque je suis arrivé à Madkoura, les soldats couchaient dans le même dortoir. Le chef Briand a décidé de construire des chambres plus intimes, en récupérant des planches dans les mechtas abandonnées. Robert Faisant, menuisier, a été l’installateur.
Le chef de poste avait sa chambre et son bureau.
Les adjoints (sergents et caporaux) avaient une autre chambre (3 ou 4 lits)
Les soldats, 6 ou 8 par chambre, avaient des lits superposés.
Chacun de nous gardait son PM (pistolet mitrailleur) ou son fusil ainsi que ses munitions (même les grenades) à proximité du lit. Seule la soute à munitions, située sous la tour nord, était fermée à clé.  
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La corvée d'eau
Tant que les villages voisins furent habités, la corvée d’eau a été assurée:
- une semaine par la famille Tablit d’Imdra;   
- la suivante par la famille Ouar de Ouaren.
Tablit était revenu au village après avoir passé une vingtaine d’années à Paris, rue Lépine (coiffeur).
Il était très intelligent et très rusé; il savait parler au Chef de poste auquel il jurait toute fidélité alors qu’il nourrissait les fells la nuit . Son fils, moins futé, avait du mal à cacher son antipathie pour nous.
Ouar habitait entre Madkoura et Chéria, dans une plantation d’oliviers, endroit très accidenté. Chaque fois que nous passions devant chez lui, il nous offrait le thé. Ses enfants, des jeunes  de 17 et 19 ans, assuraient la corvée d’eau et étaient très gentils. Mais comme tous les civils, ils rendaient également de nombreux services au F.L.N. (nourriture, guet, renseignements...). Un matin, nous avons appris qu’ils avaient été faits prisonniers par la Légion et exécutés (la Légion étrangère était parfois en ‘opération’ dans le secteur). J’en ai été très choqué: j’ai passé plusieurs nuits sans trouver le sommeil... Aujourd’hui encore, je pense à ce massacre! J’estimais ces deux jeunes !
A partir d’avril 1961, ce sont les gars du poste qui ont assuré la corvée d’eau: (2 mules, 8 bidons et trois troufions): remplir la réserve d’eau de la cour d’une contenance d’environ 1000 litres.
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